Vous reprendrez bien un petit jaune?

Ça commence toujours par un léger frémissement, un je ne sais quoi de gêne aux entournures, un petit grain de sable dans la machine bien huilée..

Et voilà que les gueux sont dans la rue. Le Prince se penche alors sur cette valetaille et se trouve tout esbaudi de son audace.

N’avait il pas lui tout prévu? Des capitaux, des réseaux, des médias, des vrai faux opposants, des experts dont la spécificité est de déployer des arguments que personne ne pourra jamais vérifier. Toute cette précautionneuse stratégie élaborée bien avant son accès au trône battu en brèche par quelques milliers de gilets jaunes. Quel crime de lèse majesté !! de lèse privauté! de lèse arrogance!

Mais qui sont ils ces empêcheurs de jouir en rond de belles rentes de situations?

Et bien, ce sont ceux qui ont été oubliés depuis plus de quarante ans par tous les politiques. Ceux qui ont cru au bonheur Masstrichien et à la fin de l’inflation grâce à l’euro, au plein emploi par la libre circulation des biens et des capitaux, à fin de la racaille au karcher, au « tous  ensemble », au « en même temps » et j’en passe…. Tous ceux qui travaillent modestement, petitement, ceux qu’autrefois on appelait « les gens de peu ». Ils n’ont jamais accès aux médias, aux services publics, aux mannes de l’état providence, aux largesse des amis des puissants. Ils ne comptent pour personne si ce n’est que pour leurs enfants et leurs familles. Ils ne sont pas miséreux , juste assez riches pour être pauvres.

Ce sont les silencieux, ceux qui observent vos turpitudes depuis si longtemps, ceux qui se voient affublés du qualificatif de « populistes » quand ils se demandent où est leur pays ?

D’ailleurs on n’hésite pas à les qualifier de « sans dents », de gens qui « ne sont rien », qui coûtent un « pognon de dingue » ou d’illettrés.

Mais ces gens là, ils vous ont appris à lire et à compter, ils vous ont lavés à l’hôpital, ils vous ont secourus dans le danger, ils vous ont servis au supermarché, ils ont réparé votre voiture, ils ont gardé vos enfants. Ce ne sont pas des électeurs, ce ne sont pas des « petites gens » de la France périphérique, ce sont  nos frères, nos sœurs, nos mères et parfois nous même. Vous qui les regardez avec condescendance, sachez qu’il y a plus de noblesse dans leur indignation que de morale dans vos actes.

Ho pardon, j’ai dit un gros mot « morale » ne fait plus partie de votre vocabulaire et encore moins le mot de « fraternité ». Alors vous allez essayer de gouverner encore par la peur, angoisse anxiogène de « l’incident », hystérie de la récupération, et vous allez saturer l’espace médiatique pour brouiller le message. Mais vous ne mettrez pas sous l’éteignoir une telle colère car on peut beaucoup pardonner mais pas la condescendance ni l’humiliation.

Il me revient en tête une citation de Charles Péguy dans « l’Argent » dont je vous conseille la lecture:

« ..jamais on n’avait vu tant d’argent rouler pour le plaisir, et l’argent se refuser à ce point au travail. Et tant d’argent rouler pour le luxe et l’argent se refuser à ce point à la pauvreté »

Et bien il est l’heure de l’apéro, je vais lever mon verre à ceux qui ont dit NON.

Lavotchine.




Marcher avec Sylvain Tesson

 

Bonjour chers lecteurs,

Vous voulez devenir un marcheur? Mais pas de ceux qui marchent au pas cadencé de l’hyper-libéralisme mondialisé.

Vous voulez vraiment sortir du système? Mais sans emprunter les échappatoires autorisés et contrôlés par le pouvoir et ses séides multi-médiatisés?

Vous voulez comprendre pourquoi la nature et les animaux vous consolent de la société moderne? Mais pas en devenant un bobo-pseudo-vegano-écolo?

Alors lisez « Sur les chemin noirs « de Sylvain Tesson chez Gallimard.

Tesson, nous l’avons connu dans la solitude d’une isba au fond d’un exil volontaire sur les rives du lac Baïkal ou à bord d’un side-car soviétique sur les traces de la Grande Armée.

Ce nouvel ouvrage se distingue par un texte magnifiquement écrit dans un français limpide et lyrique mais jamais ampoulé dans une quelconque posture. Du Blaise Cendrars à la sauce d’aujourd’hui. Tesson nous fait vivre sa résurrection .Suite à un terrible accident qui le laisse pour mort il décide, envers et contre tout le corps médical, de réparer sa carcasse meurtrie et de vivifier son âme grâce à une longue randonnée sur le territoire de France.

Et si vous n’avez jamais lu du Tesson ne vous attendez pas à vivre une gentille déambulation tripadvisorisé pour cadres stressés avides de « frissons » et de « performance ». Non, bien au contraire, vous allez prendre les « chemins noirs » de l’hyper-ruralité, ces chemins qui figurent sur les cartes d’état major sous la forme de subtiles lignes noires à travers le territoire. Et vous allez le faire à pieds, de jour, par tous les temps, en dormant au bivouac. Et vous allez le faire des plages de Nice à celles du Cotentin.

Si vous voulez savoir ce qu’est de se mettre à l’écart, de faire un pas de côté, de refuser la frénésie mortifère de nos sociétés alors vous serez comblés.

Je ne résiste pas à vous livrer un court passage du livre: « Aller par les chemins noirs , chercher des clairières derrière les ronces était un moyen d’échapper au dispositif. un embrigadement pernicieux était à l’oeuvre dans ma vie citadine: une surveillance moite, un enrégimentement accepté par paresse.. »

Le livre refermé, j’ai bien sûr pensé à Joseph Kessel ou Henri de Monfreid, mais de prime abord ce qui revint à ma souvenance furent ces vers de Charles Peguy:

Vous nous voyez marcher sur cette route droite

Tout poudreux, tout crottés , la pluie entre les dents,

Sur ce large éventail ouvert à tous les vents

La route nationale est notre porte étroite.

Bien à vous et bonne lecture!

 

Lavotchkine